Il était une fois, dans une petite ville nichée au creux des vallons estriens, un duo père-fils qui rêvait d’agir concrètement pour la planète. Entre Laurier Busque, professeur retraité et son fils Nicolas, enseignant en sciences, naquit une idée magnifique : compenser les émissions de gaz à effet de serre (GES) produites par l’École secondaire de l’Odyssée à Valcourt. Et cette entreprise allait avoir un autre effet bénéfique, celui de transmettre aux jeunes des valeurs de protection de l’environnement.
Plus d’une décennie plus tard, le projet Carboneutre pousse et fleurit toujours. On peut même dire qu’un vent d’engouement le propage au-delà des limites de sa région d’origine…
Enracinement et croissance d’un rêve
L’aventure débute en 2008 par la production de petits chênes destinés à être plantés en nature. Cette démarche, reconduite chaque année depuis, vise non seulement le captage du carbone émis par l’école, mais également la restauration des feuillus nobles dans nos forêts. Du gland semé en pépinière à l’arbre en pleine terre, tout le processus est confié aux élèves des classes de sciences et technologies de Nicolas Busque.
5 000 arbres plus tard et grâce à la participation de 760 adolescents, l’épopée continue toujours et comporte désormais plusieurs autres volets.
De la compensation à la réduction
Non seulement Nicolas et ses étudiants désirent compenser les émissions de carbone dont ils sont responsables, mais ils s’affairent aussi à diminuer leur production de GES à la source. Par exemple, les jeunes et le personnel de l’Odyssée décrètent des journées où aucune électricité n’est utilisée dans l’établissement d’enseignement. De plus, les élèves compostent, apprennent à jardiner et organisent une grande activité de troc qui leur évite d’acheter des cadeaux de Noël.
Mais leur plus grande fierté reste sans doute le « mur solaire ». Installé en 2016, ce gigantesque panneau attaché au mur extérieur du gymnase constitue un système de préchauffage de l’air par le soleil. Il contribue à diminuer grandement la consommation d’électricité utilisée pour le chauffage du bâtiment et permet chaque année d’éviter l’émission de trois à quatre tonnes de GES.
Pour que germe la conscience
Quand on discute avec Nicolas Busque, on sent bien qu’au-delà de diminuer l’empreinte environnementale de son école, il désire surtout sensibiliser et éduquer les jeunes et les gens de sa collectivité. Il veut leur transmettre la conviction qu’il est possible d’entreprendre, dès maintenant, plusieurs actions pour renverser la crise environnementale.
Le prof visionnaire affirme qu’il est impératif de former des écocitoyens, c’est-à-dire des personnes attentives, renseignées et actives. C’est donc pour cela qu’il prend très au sérieux son rôle d’éducateur à l’environnement : « c’est notre responsabilité en tant qu’adultes d’accompagner les jeunes, de les écouter, de les outiller. Ils veulent agir mais ne savent pas toujours quoi faire. Nous avons vraiment un devoir moral envers eux. »
Alimentation en plein air
Ensemble on va plus loin
L’éducation à l’écocitoyenneté passe certainement aussi par un peu de mobilisation collective pour faire pression auprès des élus… Ainsi, l’an dernier, M. Busque a épaulé ses étudiants dans la préparation d’un manifeste que ces derniers ont présenté au conseil municipal de leur ville. On y retrouvait, entre autres, des revendications qui reflètent leurs inquiétudes face à l’utilisation des plastiques à usage unique. On y parlait aussi de l’urgence d’une transition énergétique.
On protège ce qu’on connaît
Nicolas Busque mentionne qu’il faut d’abord aller jouer dehors et connecter avec la nature pour ensuite vouloir la protéger. Notant que ses étudiants présentaient des symptômes de « déficit de nature », l’enseignant a récemment instauré le programme Écopleinair à l’Odyssée.
Ce nouveau cours de 5e secondaire sort les adolescents des classes et les place en contact étroit avec l’environnement. Il comporte des activités extérieures allant du canotage au ski de fond, en passant par l’étude des sols et la cuisine en plein air. Les jeunes y développent une passion et un enthousiasme pour le milieu naturel qui les suivront toute leur vie!
Sortie de canot du groupe Écopleinair
Répandre les semences du changement
Le plus important pour Nicolas et son équipe, c’est que tous leurs efforts motivent d’autres communautés à agir. Plusieurs écoles de la province se sont d’ailleurs déjà inspirées du projet Carboneutre pour diminuer leur impact écologique, notamment à Rigaud, Acton-Vale, Montréal, Windsor, Magog et Lévis.
Mais le rêve ultime de l’instigateur du projet est de convaincre notre gouvernement que l’écocitoyenneté devrait faire partie intégrale du programme scolaire, du primaire au secondaire. « Il faut revoir ce qu’il est important d’enseigner aux élèves. Et c’est de l’action dont les jeunes ont besoin, pas seulement d’apprendre dans les livres. »
Selon Nicolas, l’apprentissage du jardinage pourrait bien un jour primer sur la mémorisation du tableau périodique des éléments dans nos écoles. Du moins, c’est ce qu’il espère!